Durant des décennies, la communauté scientifique s’est demandé à quel point la forêt Amazonienne avait les capacités naturelles de se régénérer face à l’avancée incessante de la déforestation. Dans quelques semaines, l’Institut national Brésilien de recherches spatiales (INPE) va communiquer les chiffres officiels du déboisement en Amazonie pour l’année 2020, chiffres qui semblent être supérieurs à ceux de 2019.
Aujourd’hui, près de 20% de la superficie originelle de la forêt ont d’ores et déjà disparu. Les autres 80% sont toujours intacts. Mais l’avancée en continu de la déforestation fait cependant que la région se rapproche chaque jour un peu plus d’un point de non retour où toute la région Sud de l’Amazonie va peu à peu se transformer en une immense savane.
En 1991, le chercheur brésilien Carlos Nobre a mené une étude remarquable montrant les impacts du déboisement sur l’Amazonie. À l’aide d’un programme informatique couplé à un modèle reprenant les données de la circulation de l’air et de la condensation des nuages ainsi que de la végétation existante, Nobre a fait des projections des conditions climatiques pouvant affecter la région à partir des résultats obtenus sous forme de scénarios probables.
L’étude a ainsi montré que lorsque les forêts sont remplacées par des pâturages, il en découle une diminution de 30% de la “transpiration” de la végétation - processus d'absorption de l’eau présente dans les sols et de son recyclage dans l'atmosphère par évaporation - , une baisse de 25% des précipitations ainsi qu’une réduction de 20% du ruissellement des eaux en surface. Par conséquent, dans ces conditions, on assisterait à une hausse des températures de l’ordre de 2.5ºC, la saison sèche serait prolongée, et les capacités de régénération de la forêt seraient compromises, débouchant sur une savanisation de la région.
De nombreuses études ont par la suite renforcé cette analyse. Déjà en 2005, un certain consensus était atteint en ce que l’augmentation de la déforestation et la réduction de la “transpiration” de la forêt touchaient directement les régions agricoles sud-américaines, irriguées depuis toujours par les “rivières volantes” des pluies engendrées par la forêt Amazonienne. En dehors du Chili - protégé de l’humidité par les Andes -, tous les pays du sous-continent et leurs économies seraient touchés : Argentine, Uruguay, Paraguay, et bien sûr le Brésil.
En 2007, Carlos Nobre a publié un nouvel article en actualisant quelque peu les données à l’éventualité d’une future déforestation, et a conclu qu’une perte de 40% de la forêt ferait irrémédiablement nous approcher d’une sorte de “point de rupture“ où le fonctionnement naturel des écosystèmes en Amazonie atteindrait sa limite. Aujourd’hui et face à l'expansion en continu de la déforestation de ces dernières années, les spéculations sur ce point de non retour vont bon train, ont définitivement capté l’attention des médias et font présager un possible effondrement des étendues forestières restantes dans la région.
Plus récemment, en 2018, en association avec le biologiste américain Thomas Lovejoy, Carlos Nobre a publié une étude reconnaissant que ce point de rupture des systèmes hydrologiques devrait être revu en considérant les “synergies négatives ” actuelles entre déforestation et changements climatiques. En prenant en compte la recrudescence continue des feux de forêt à l’est, au sud-est et au sud de l’Amazone, ce moment charnière de la fragilisation de l'écosystème correspondrait dorénavant à une perte de 20 à 25 pourcent des étendues de forêt.
Quoi qu’il en soit, la tendance ne s’est toujours pas inversée. En décembre 2019, Nobre and Lovejoy écrivent un nouvel article extrêmement alarmant intitulé Point de rupture en Amazonie : Une derniere chance pour agir, affirmant que le changement climatique a d’ores et déjà altéré les dynamiques naturelles de la région. “Le moment charnière, c’est ici, c’est maintenant” affirment ils. Preuve en sont les étés toujours plus longs et plus chauds, les intenses sécheresses toujours plus fréquentes comme celles de 2005, de 2010 et de 2015, et l’augmentation du taux de mortalité prématurée chez de nombreuses espèces de plantes.
Si les scientifiques disent vrai et que le déboisement effréné continue d’augmenter, les régions d’Amazonie qui en sont les plus affectées pourraient bel et bien déjà être en cours d’effondrement, en accentuant les processus de savanisation en cours. Il en résulterait non seulement un appauvrissement de la biodiversité, mais aussi une altération du climat pour la région comme un tout.
Tous les mois, Story Productions propose un coup de projecteur sur le Brésil avec Ricardo Arnt, auteur et journaliste brésilien de plus de 40 ans d’expérience. Ancien rédacteur en chef pour la revue mensuelle Planeta et pour la chaîne de télévision Bandeirantes TV, il a aussi été éditeur pour la revue Exame, le quotidien Folha de São Paulo, mais aussi pour la revue Superinteressante et les sujets à l’international du journal du soir à TV Globo.
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